A review by oursinculte
Sins of Empire by Brian McClellan

5.0

Il y a (trop) longtemps, j’ai lu et énormément apprécié la trilogie des poudremages de Brian McClellan. La trilogie de « fantasy à poudre » dont la publication française s’est noyée avec la collection Eclipse de Panini est pourtant une des meilleures sagas de fantasy moderne, et elle a donné suite à une seconde trilogie qui fait dodo dans ma bibliothèque depuis 2 ans. Il était temps de sortir Sins of empire, premier tome de la trilogie Gods of blood and powder.

Une dizaine d’année après la guerre entre Adro et Kez, Vlora est partie vers le nouveau-monde colonisé de Fatrasta et y commande une compagnie de vétérans mercenaires. La chancelière engage les Riflejacks, les mercenaires en question, pour capturer la meneuse des indigènes Palo qui fomente une rébellion dans les bas-fonds de la capitale de Landfall. De son côté, l’espion Michel Bravis est lancé sur la piste d’un tract anti-gouvernemental dont le réseau de distribution cache quelques secrets. Et enfin, l’ancien héros de guerre Mad Ben Styke a passé des années dans un camp de travail après avoir été condamné pour trahison (et exécuté, aussi, mais ça a moyennement marché, manifestement), mais voilà qu’un mystérieux commanditaire le fait libérer et le charge d’une mission : infiltrer les Riflejacks et se rapprocher de Vlora Flint.

Si la première trilogie de Brian McClellan se déroulait pendant (et après) une pseudo-révolution Française, ici on part plutôt dans une pseudo-Amérique colonisée qui a déjà un passé plein de conflits, de héros et de drames. C’est d’ailleurs de là que revenait Taniel et Ka-Poel dans la première saga. Il faut d’ailleurs noter que pas mal d’évènements de l’histoire de Fatrasta évoqué dans Sins of empire sont relatés dans certaines novellas de l’auteur (Notamment Ghosts of the Tristan Basin et The mad lancers), mais aucun souci de compréhension si comme moi vous ne les avez pas lues. Mais dans le roman qui nous intéresse aujourd’hui, le gouvernement est déjà bien installé et règne notamment grâce à une police secrète qui ressemble plus à une mafia, dont Michel fait partie, les Blackhats. Extorsion, censure, trafics, avec tout ça les tensions entre les Palo et les Blackhats sont très présentes, et seront un des piliers de l’histoire.


L’atmosphère du roman est très différente des précédents romans de l’auteur, ici on a une histoire qui se déroule dans une cité, avec beaucoup d’espionnage, de complots et de résistance cachée. Et la clé de la réussite de ce bouquin est dans ses personnages qui sont tous très réussis et engageants. Vlora en Général d’une grande compagnie est convaincante, son duo avec Olem marche extrêmement bien et donne de grands moments de tensions et de doute. Michel est génial en espion subtil, très peu porté sur la violence, il suit soigneusement les pistes et rassemble les informations pour arriver à ses fins. Il est poussé par sa volonté de gravir les échelons des Blackhats mais rend quand même visite à sa mère de temps en temps pour lui acheter des bouquins, et ça c’est meugnon. Quant à Mad Ben Styke, quel personnage ! Colosse de l’ancienne cavalerie, il cherche à se faire discret mais son lourd passé va vite le rattraper, et maintenant il doit aussi protéger la petite Céline qu’il a fait sortir avec lui du camp de prisonniers. Héros « Drussien » par excellence, trahi et estropié par ceux qu’il servait, son arc et celui des anciens Mad lancers est impressionnant.

Mais l’aspect le plus maitrisé du roman est la solidité du réseau de relations entre tous ces personnages et d’autres secondaires. Les trois arcs et points de vues sont étroitement liés et se croisent sans arrêt, les répercussions de chaque évènement sur tous les protagonistes sont claires et bien amenées. J’ai rarement lu un roman à l’intrigue si complète et cohérente. Et si une grosse partie du roman se concentre sur les personnages et une intrigue politique-espionnage, au bout d’un moment évidemment ça dégénère et on prend les armes. Et là c’est badaboum grandiose et tension extrême, loyauté, trahison, révélations, tout s’enchaine et se déchaine. C’est fort, tendu, cohérent et parfaitement articulé, d’une clarté irréprochable sur l’allégeance et les motivations de chaque personnage qui, pourtant, n’arrêtent pas de nous surprendre.

La magie est toujours présente mais reste en fond relativement discret pendant une grosse partie du roman. On a toujours quelques bastons à base de magie de poudre, quelques références aux Privilégiés et aux mages de sang Palo, mais l’intrigue n’insiste pas forcément sur ces enjeux, jusqu’à un certain point. On va pas vous détailler chaque détail par le menu, on est (toujours) pas chez Sanderson. C’est même marrant parce que certains personnages usent de magie un peu en mode expérimental, « je sais pas du tout ce que je fais mais on va tenter le coup ». Pourtant l’univers est toujours très solide de ce côté-là aussi.

Brian McClellan étend son œuvre et tisse un réseau d’histoires et de personnages qui couvrent plusieurs romans et novellas, sans qu’on ait forcément besoin de tout lire dans l’ordre. Ici il y a assez de rappels pour commencer la trilogie sans avoir rien lu, tout est très bien resitué dans Sins of empire. Ces zones d’ombre attisent même la curiosité et ne soyez pas surpris de voir surgir des chroniques sur The mad lancers et Ghosts of the tristan basin dans les mois qui viennent.

Au final, cette nouvelle trilogie commence en grandes pompes. L’auteur nous livre son meilleur roman (jusqu’ici) et quand on voit le niveau de ce qui précède, on ne peut être qu’impressionné par l’évolution de son écriture. Sins of empire est simplement exceptionnel, et j’ai hâte de continuer ma lecture de Gods of blood and powder.

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